#Opinion
- 29 avr. 2021
Et si l’avenir des jeunes était aussi entre les mains des entreprises ?
Agathe Joubert
Directrice de clientèle
Aujourd’hui, près de ⅓ des jeunes entre 18 et 25 ans sont en dépression. Un chiffre alarmant qui s’amplifie chaque jour que la crise sanitaire se poursuit . Depuis plusieurs mois la jeunesse interpelle l’opinion publique pour agir et trouver des solutions, entre les manifestations de mars dernier pour ne “pas être la génération sacrifiée”, les revendications sur les conditions financières extrêmement difficiles des étudiants, un revenu de base préconisé par France Stratégie et un certain nombre de personnalités politiques. Les conditions d’études se concrétisent alors par une augmentation des décrochages et d’abandons - leur futur apparaît très obscur. La jeunesse est démunie face au monde d’aujourd’hui et le sera encore plus face au monde du travail qui l’attend.
Des aides mais un manque de stratégie globale
De nombreuses actions ont été menées par des associations depuis plusieurs mois pour aider les jeunes en difficulté. Elles deviennent des acteurs à part entière, indispensables dans la vie de nombreux étudiants et jouent quasiment le rôle attribué au service public. Pendant ce temps, l’action gouvernementale reste sans véritable stratégie. Les aides à l’embauche, les aides financières d’urgence, les 20 000 jobs étudiants pour venir en aide aux étudiants décrocheurs, le renforcement de la Garantie jeunes, le CROUS repas à 1€, l’implication du SNU, etc. sont représentatifs d’une accumulation d’aides sans réelle vision globale ni cap à moyen terme. Les aides proposées par le gouvernement restent éparses et mériteraient de s’inscrire dans un projet d'ensemble autour d’une logique interministérielle pour permettre de contrecarrer l’impact très néfaste de la Covid-19 sur l’avenir des jeunes au sein du monde du travail.
Malgré des tentatives de communications dédiées à ce public, le Gouvernement ne convainc pas. Le hashtag #etudiantspasinfluenceurs a ainsi montré des étudiants révoltés face au dernier coup de com’ du Gouvernement en recourant à des personnalités qui ne sont pas représentatives des jeunes en France, pas même étudiants.
Et les entreprises dans tout ça ?
Quelle peut être et quelle doit-être la partition des entreprises dans ce contexte ? Comment peuvent-elles contribuer à un avenir plus serein pour les plus jeunes générations ? Qu'en attendent réellement les jeunes ? Les entreprises suscitent-elles davantage de confiance que le Gouvernement ?
Dès janvier, des entreprises se sont mobilisées à l’échelle locale en mettant à contribution leurs employés, en fournissant des repas, en proposant des offres d’emploi, comme le Groupe Pénélope en mars. Certaines entreprises proposent des collectes alimentaires qui sont ensuite récupérées par des associations et bénévoles, comme Macif avec Diffuz ou avec son engagement pour l’insertion professionnelle, mais cela reste minoritaire et une action de court terme.
Dans un autre registre, le symbole “open to work” ou les autres messages relayés sur LinkedIn sont des actions solidaires individuelles pour mettre à profit son réseau et communiquer. Un bon coup de main sur la mise en relation qui ne remplace cependant pas une stratégie globale menée par une entreprise.
Accompagner la jeunesse sur le long terme pour les entreprises ...
Certes les entreprises sont incitées à recruter avec les aides gouvernementales, mais elles peuvent aller plus loin et penser à long terme. Ces actions solidaires répondent à des intérêts économiques d’un instant T sans offrir un accompagnement plus global pour la jeunesse française. Elles sont un maillon essentiel pour assurer une économie à la jeunesse d'aujourd'hui qui deviendra leurs collaborateurs de demain.
Toutes les entreprises doivent s’engager dès à présent en proposant à ces jeunes de construire une nouvelle société. Sans lien avec cette jeunesse, comment réussir à lui donner envie de vous rejoindre ? Comment créer une cohésion sociale entre les acteurs ? Comment permettre à votre entreprise de continuer de progresser ?
Ce n’est pas un sujet qui concerne uniquement les entreprises à mission, mais bien toutes les entreprises. Ces dernières doivent veiller à construire une société avec une meilleure cohésion entre les acteurs, en créant des interdépendances et des liens forts, durables et des intérêts réciproques entre ceux-ci.
Les entreprises doivent prendre leurs responsabilités pour assurer une diversité de profils, pour permettre à ces étudiants qui n’ont pas eu les mêmes conditions de réussite que les précédentes années de décrocher un emploi, de les former pour leur donner les chances de réussir et donc de faire progresser l’entreprise.
… Une stratégie gagnant-gagnant
Les bénéfices pour les entreprises qui s’engageront dans cette voie sont nombreux :
une réputation positive pour l’entreprise qui donne des perspectives d’avenir,
des recrutements diversifiés avec de bons profils en leur offrant un parcours à long terme,
un impact positif pour permettre à chacun d’avoir une chance de réussir.
La mobilisation par les entreprises doit se faire au profit de la création de valeur, pas seulement pécuniaire, mais de valeur sociale et humaine. Et c’est exactement la raison pour laquelle l’État, garant de la concorde et de la paix sociale, seule entité légitime et responsable, qui doit assurer que la mise en œuvre de mesures, aussi bien dans la sphère publique que privée, répondra aux enjeux de protection de la jeunesse. Contrôle et régulation sont ainsi nécessaires pour contrebalancer les éventuels déséquilibres du système, et garantir que l’on ne sacrifiera pas toute une génération sur l’autel du laisser-faire.
AGATHE JOUBERT & FLORIAN AUBERT,